Je pensais que le sujet « objectif SMART » était un sujet bateau, mais avec 18000 recherches mensuelles sur internet, eh bien non ! A y réfléchir, c’est à l’opposé de notre culture latine. Pas convaincu ? Pour démarrer votre prise de poste en beauté, vous allez vous offrir du confort SMART.
Quelques verbatim en conséquence d’objectifs pas SMART
« Ce n’est pas le travail que je t’ai demandé ! » Il manquait le S de SMART…
Le résultat est discutable ? Il manquait le M…
Une autre : « Elle m’a présenté le tableau, c’était tout faux, du n’importe quoi. Je lui ai tout redit ». Je parie que le 2e rendu sera du même tonneau. (Elle ne sait toujours pas faire). Il manque le A…
Et dans l’entreprise d’un autre client, les emails sont TU, TTU et même TTTU : très très très urgent ! Il manque le R…
Enfin, lors d’une séance, mon client, un Manager de Managers me dit : « Je lui ai déjà demandé 5 ou 6 fois, et ce n’est toujours pas fait, ça m’énerve ! » Ben, il manquait le T…
Une culture d’entreprise sans objectif SMART en interne, écartelée par les contrats juridiques et deadlines clients précis
C’est curieux, les contrats sont clairs, les relations clients-fournisseurs aussi, avec des livrables et des deadlines. Mais dans cette autre Entreprise un peu paternaliste, tout le monde se ménage, du coup les rôles et responsabilités se chevauchent. Et surtout les instructions ne sont pas toujours très claires, surtout quand on a peur de recadrer, ou d’être un poil directif quand c’est nécessaire, c’est à dire SMART !
Flou à tous les étages
Et comme le patron montre l’exemple, ça ruisselle forcément dans toute l’Entreprise. Ben oui, l’exemple vient toujours d’en haut. Même des managers plus récemment recrutés, et venant de confères plus carrés, finissent pas adopter le style. Donc, sur le terrain, c’est humain, on en joue un peu, plus ou moins volontairement. Pour peu que le pilotage des Activités soit aussi un peu flou, ça part dans les décors avec dérapages et des reprises de cap un peu périlleuses. Du genre, des coups de fil un peu énervés…
SMART en bon français
Smart, ça veut dire élégant ou intelligent dans la langue de Shakespeare. Ça colle très bien à l’acronyme SMART des objectifs.
S comme Spécifique
Un objectif spécifique, c’est un énoncé précis du paquet cadeau attendu, du livrable. C’est aussi exprimé dans un niveau de langage qui parle au destinataire. Donc, c’est souvent à traduire dans une formulation plus opérationnelle à mesure qu’on descend les strates de la stratégie et de la « haute Direction ». C’est aussi à définir précisément par rapport à l’activité du destinataire.
Ex : développer le chiffre d’affaires de 20%, devient « développer les ventes de 20% », et même « augmenter le nombre de visites prospects de 40% » (au pif)
Un écrit par mail, sur un plan d’action, ou sur un tableau mural, selon l’importance du sujet, permet de graver un peu dans le marbre, et cela permet aux individus qui sont plus visuels qu’auditifs de capter l’information.
C’est aussi important d’être précis sur le niveau de qualité attendu, car il y a des perfectionnistes à tous les étages. Si votre demande peut se suffire d’une ébauche dans un premier temps, ou d’un 20/80 ou d’un top 3, autant le dire. La responsabilité du Manager est également de réfléchir à un objectif raisonnable, surtout s’il a tendance à être lui-même perfectionniste.
Et pour finir avec le S, parfois le Manager devra vérifier que c’est bien intégré. Selon les individus, il faut parfois poser une question ouverte : qu’as-tu compris ?
M comme Mesurable
Mesurable signifie que vous allez quantifier l’objectif par des indicateurs sur une ou plusieurs échelles : une quantité, un volume, un niveau de qualité, un délai, un ratio, un pourcentage, des Euros, un niveau de comparaison, un étalon, …
L’objectif contient tantôt une valeur cible, une fourchette, un minimum ou un maximum. Comme sur la route, ou comme dans les bilans sanguins.
Actionnable
Ici, on parle de compétences. Une question ouverte peut aider à vérifier le niveau de compétence. « Comment vas-tu t’y prendre ? Comment comptes-tu t’y prendre. » Si besoin, le Manager entre dans son rôle de transmettre son savoir-faire, c’est le moment de faire un topo, une mini formation, donner une explication détaillée. Puis de questionner que le collaborateur a bien en main le savoir-faire.
On est aussi sur les motivations. Avec les questions ci-dessus, vous allez sentir si votre interlocuteur répond avec un ton du type « motivé ». Si le ton est évasif, cela laisse supposer que qu’il n’est pas trop motivé ou bien il est occupé sur autre chose… A vous Manager de le mobiliser. Sinon l’objectif risque de ne pas être actionné.
Réaliste
Si vous êtes très créatif, du genre 100 idées à l’heure, il est probable que vous demandiez trop. Ça finit par ne plus être réaliste, d’autant plus tout n’est peut-être pas si utile ou important. D’ailleurs, vos collaborateurs vous ont reconnus, ils attendent l’idée suivante…
Ou bien, vous êtes un bourreau de travail. J’ai coaché un jour un chef comptable qui subissait tellement de pression, sans savoir d’ailleurs la filtrer, qu’une comptable de son équipe avait fait une tentative de suicide sur le lieu de travail. Sa N+1, Directrice du contrôle de gestion, était réputée pour se fixer des objectifs bien au-dessus des attentes du DG. Dixit le DRH avec qui j’ai recollé les morceaux.
Vous allez donc définir des indicateurs pour mesurer la charge de vos collaborateurs, voire de les aider à prioriser en arbitrant, si vous identifiez leur surcharge au delà du raisonnablement ambitieux.
J’ai ainsi coaché une cadre brillante qui passait hélas des soirées et même parfois des nuits au bureau, rappelée à l’ordre par le veilleur de nuit, en vain ! Elle était en plein pré-burnout. Sa hiérarchie l’a repéré in extremis. Et elle est sortie de sa spirale infernale et irréaliste.
Temporisé
Enfin, avec le T, le Manager exprime une deadline de façon explicite. Il peut aussi définir des jalons intermédiaires, pour guider et évaluer l’avancement de l’objectif, s’il craint un dérapage.
Plutôt qu’un « J’aimerais… », ou un « ce serait bien que ça ne traine pas trop », « je te demande d’accomplir ce travail pour [telle date, voire telle heure] »
Un ton toujours aimable grâce à des objectifs SMART
En sortant ainsi du flou, vous pouvez rester bien sûr parfaitement respectueux et aimable par une phrase d’introduction agréable et toutefois transparente : « Peut-on se voir un moment, j’ai besoin de te demander un travail spécial / J’aimerais que nous nous calions précisément / pour que nous travaillions de façon plus sûre, dans l’intérêt du Service / de l’Entreprise / de nos clients…
Des objectifs SMART vers le bas et vers le haut !
Les objectifs SMART se déclinent assez naturellement vers le bas.
Rien n’empêche de les utiliser, avec un peu de doigté, avec votre hiérarchie, en particulier lors de votre prise de fonction. Si votre patron n’est pas clair, vous avez une grille de lecture pour lui poser des questions, lui faire préciser des points, et aussi pour négocier, lui faire une demande, ou le faire arbitrer, avec arguments et propositions. Vous rendrez ainsi service à votre Activité et à votre équipe. Vous pourrez ensuite décliner vos propres objectifs de façon tout aussi SMART au sein de votre équipe.
Cela vous évoque-t-il des sujets passés ou présents où les objectifs n’étaient pas trop clairs, voire carrément flous ? (Que ce soit de votre fait ou pas)
Exercez-vous à en SMARTer un ou deux, sur un papier, puis testez la mise en œuvre, pour le fun.