Prendre sa place vs imposture
Prendre sa place avec autorité naturelle est une juste quête, aux antipodes du sentiment d’imposture.
Prendre sa place est un des objectifs les plus cités dans les réunions initiales de coaching avec mes clients. Tant par l’intéressé que par sa hiérarchie. En particulier en prise de poste.
- « Trouver ses marques »
- « Tester et installer de nouveaux réflexes »
- « Apprendre un nouveau métier »
- « S’imposer dans une structure déroutante » Sic. S’imposer ? il y a mieux ! …
Ces comportements visés permettent de trouver sa légitimité et de sublimer un possible sentiment d’imposture. Vous sentons bien ici que le regard des autres sur vous est déterminant, et vous invite justement à trouver votre style propre, votre style de management, par rapport à la culture de l’Entreprise dans son environnement, et quel que soit votre prédécesseur et son aura rémanente.
L’enjeu est donc de d’aller trouver et sentir cette autorité naturelle, en vous alignant avec vous-même, pour incarner une saine affirmation de soi basée sur votre éthique, vos valeurs, et vos ressentis corporels. Et non pas sur de l’ego, qui est encore en rapport avec le regard des autres.
Comment donc inspirer davantage tout votre entourage professionnel, en dégageant de la sérénité et du respect, par votre attitude et vos comportements ?!
Dans vos rôles et responsabilités de Manager, il y a beaucoup d’actions favorables à construire de l’autorité naturelle :
- Clarifier et communiquer la stratégie et les objectifs,
- Définir les moyens,
- Rassembler,
- Orienter,
- Organiser,
- Stimuler,
- Responsabiliser,
- Etc.
Et il y a plus rarement en fait de l’autorité tout court (voire de l’autoritarisme) :
- Prendre des décisions,
- Arbitrer,
- Gérer des conflits,
- Dire non, etc.
Ce n’est pas l’image classique du management, car on entend souvent :
- S’imposer
- Prendre position
- Reprendre la main
- Remettre de l’ordre
L’usage des premiers comportements évite souvent le recours aux seconds, à condition d’en être convaincu et de bien s’y prendre, avec motivation, compétence et sincérité !
Votre autorité naturelle se nourrit de positif
Un premier ensemble de croyances positives à garder en tête sont que vous avez été sélectionné parmi d’autres, et choisi pour vos qualités propres, pour votre potentiel, ce que vous montrez et ce que les autres voient de vous. Et si vous êtes en accord avec vos aspirations et vos valeurs, vous êtes bien parti pour réussir. En revanche, si vous n’êtes pas profondément attiré par le poste, il va falloir vous mobiliser vous-même pour passer un cap qui pourrait tout de même être une révélation (ou partir en courant !).
La contrepartie de ces croyances positives est de débusquer un éventuel discours intérieur négatif, qui vous fait douter de vous, vous stresse, vous empêche de dormir à poings fermés, réveille soudainement des craintes et des peurs, du fait de la bonne marche d’escalier à grimper d’un coup, dans une prise de poste rapide.
Positif et négatif
Voici un autre éclairage sur le positif et le négatif. Par une tendance bien humaine, nous sommes en général plus sensibles au négatif qu’au positif. Le négatif nous impacte plus que le positif. Le négatif est plus brutal que le positif et réveille donc plus d’émotions fortes que le positif. Les émotions liées au positif sont en revanche plus douces, plus délicates, moins spontanément intenses que celles liées au négatif.
Par exemple, les médias ne se gênent pas pour capter notre audience par du sensationnel catastrophique. de façon un peu similaire, en Entreprise, on produit et on résout des problèmes avec des objectifs tendus, car cela fonctionne avec l’adrénaline qui nous fournit du tonus. En revanche, en écoutant de la musique douce, on va ressentir des émotions positives et relaxantes, invitant à la détente. Pas trop compatible pour générer des résultats en Entreprise, d’où les projets constants pour booster tout le monde.
Donc, pour se mourir de positif, on va tâcher de se situer dans la zone du plaisir moteur.
D’ailleurs, si vous êtes dans l’adversité, la culture Etats-Unienne vient à point : on se relève d’un échec, les difficultés sont des challenges, il y a toujours des opportunités, il y a toujours un côté positif à découvrir dans une situation « compliquée ».
Un challenge qui n’est pas assorti d’un soutien adéquat (lisez cet article sur la motivation) peut facilement faire basculer dans un mauvais stress. Le stress, selon les typologies de Jung, peut être léger ou lourd, mais il nous coupe toujours de certaines de nos ressources, par ailleurs disponibles dans un contexte sans stress. A surveiller donc pour s’atteler à le résoudre. Si vous espériez mettre un mouchoir dessus, ça risque de ne pas être tenable très longtemps. Votre corps vous rappellera à l’ordre si votre mental s’obstine à nier vos ressentis profonds.
La proie pour l’ombre
Il y a, certes souvent, le sujet d’apprendre un nouveau métier :
- Soit, vous devenez « Directeur de B.U. » pour la première fois, motivé par votre ambition, par l’envie d’avoir les mains (un peu plus !) libres, ou par l’envie d’impulser un projet d’ampleur. Vous avez précédemment déjà acquis plusieurs savoir-faire de Manager. Votre prise de fonction inclut ici beaucoup plus de relationnel.
Votre fonction devient beaucoup plus politique, beaucoup plus long terme, et impose une grande délégation de l’opérationnel, avec un management direct par exception, pour éviter le « micro-management ».
- Soit, vous devenez « Manager de Managers » pour la première fois, et vous allez céder le management opérationnel pour vous concentrer sur le moyen et long terme, transmettre votre savoir-faire et développer vos N-1 pour les amener à vous libérer de l’opérationnel et les challenger raisonnablement pour qu’ils progressent.
- Soit, vous devenez « Manager pour la première fois », ou Chef de projet d’une équipe, en venant d’un métier de contributeur individuel. Vous allez devoir apprendre à « faire faire », tout en transmettant votre savoir-faire de producteur. Ce faire-faire englobe un grand nombre d’aspects en terme d’activités, et de savoir-être. Vous devenez pour la première fois un encadrant.
Dont l’exemplarité dans vos rôles et responsabilités va avoir un effet sur toute l’équipe d’un coup, sur tout le fonctionnement d’un service ou la réalisation d’un projet.
Un bon double challenge, hé, hé
Dans les trois cas de promotion verticale, vous faites face à un double challenge : lâcher ce que vous maîtrisez bien et acquérir de nouvelles compétences d’un ordre bien différent.
Ce qu’on fait bien, si cela nous intéresse, est doublé de plaisir. Alors que l’inconnu peut provoquer des craintes : serai-je à la hauteur, … ? Derrière soi, le plaisir, devant soi, l’appréhension. Il y a donc là un travail spécifique à faire pour transférer son plaisir sur des activités différentes.
Le discours intérieur négatif, voir plus haut, est bien évidemment introjecté par l’éducation et la culture. On le fabrique très tôt dans la vie, et son volume sonore peut brouiller la confiance en soi.
Par exemple, le perfectionnisme est un poison parfaitement toxique pour le métier de Manager, car il empêche de prendre de la hauteur, de s’adapter, de prioriser. Ce poison est d’ailleurs bien différent de la précision, de l’amélioration continue ou de la persévérance.
Autre exemple, faire plaisir, quand c’est un introjet, est incompatible avec le métier de Manager. En revanche, manager son équipe pour qu’elle ressente du plaisir à travailler est un sujet passionnant. Et qui procure le plaisir de faire grandir les autres, tout en grandissant soi-même.
Trois autres postures pour développer votre autorité naturelle
Une fois ces soucis résolus (et cela peut demander un travail de fond sur soi), je vois 3 axes positifs à incarner, en plus de celui cité au début de ce chapitre, pour prendre sa place :
- Rester humble. L’humilité attire à la bienveillance et l’envie d’aider, alors que l’arrogance attire le mépris, voire les peaux de banane !
De plus, en oubliant de rester humble, vous allez vous mettre dans l’effort. Cela crée du stress, et ce n’est pas bon du tout pour développer votre autorité naturelle. Lâchez prise !
Se donner le droit à l’erreur (ne pas savoir, ne pas comprendre, se tromper) est aussi important pour soi que de l’accorder aux autres, notamment aux collaborateurs, en les « couvrant » si nécessaire. Pour tous, le droit d’apprendre, de tester et de s’ajuster.
En particulier, pendant les premiers temps de votre prise de poste, cette humilité est de mise. Si vous la conservez par la suite, cela sera tout à votre honneur, et cela est parfaitement compatible avec la fermeté que requiert votre fonction.
Un exemple frappant m’avait été donné par un manager qui nous avait rassemblé dans une situation critique. Il avait démarré la réunion par un incroyable : « Là , je ne sais pas faire. Nous allons y réfléchir ensemble ». Il nous avait instantanément déclenché une envie collossale de nous surpasser pour trouver une solution.
- Adopter une posture professionnelle de haute qualité : rechercher la vérité et le factuel, confronter (avec courage ou simplicité, au choix), éviter toute malveillance ou ironie (à ne pas confondre avec l’humour ou l’auto-dérision), ainsi que toute manipulation. Voici d’autres qualités à adopter et incarner.
Tout cela facilite les rapports humains et la progression de l’Entreprise, en plus du caractère exemplaire incontournable pour un Manager. A contrario, quand le mauvais exemple vient du haut…
Un Manager client avait dit, un jour dans une réunion d’équipe : « l’ironie n’est pas une valeur de management ».
Sérieux et fun
- Non le moindre : du fun, qui est le pendant du sérieux ! Oui, du sérieux et du fun !
Être sérieux et fun commence par « pas de médecine des morts », c’est à dire ne pas s’appesantir sur les loupés, c’est fait, c’est du passé. On ne peut pas revenir dessus, sauf pour en tirer des leçons.
Puis, mettre toujours l’accent sur les succès, les avancées, le possible, et sur la créativité. C’est fun, c’est entraînant.
Et encore : le sourire, les franches rigolades, et le festif.
En tant que Manager, votre rôle de leader vous impose de monter en scène quasiment en permanence. Votre bonne humeur va se répandre. (A contrario, qui a envie d’être managé par un type super sérieux, qui ne sourit pas ?)
D’ailleurs, en vous connectant à votre bonne humeur, vous vous sentez rayonner de votre autorité naturelle, comme quand vous êtes au naturel !
Celui de mes nombreux Managers qui m’a le plus marqué était le plus joueur et fantaisiste de tous, dans bien des siutations. et il savait aussi être parfaitement rigoureux pour régler les problèmes et assumer son rôle. Je m’étais alors énormément investi, car l’ambiance générale de l’équipe était de ce fait sur le même ton.
En montrant de la bonne humeur, vous allez aussi facilement expérimenter la circularité de la communication : ce que vous rayonnez revient vers vous sans tarder.
Et pour vous ?
Si « prendre sa place » est un sujet pour beaucoup, quelle serait la principale raison pour que c’en soit également un pour vous ?
Serait-ce un nouveau sujet pour vous ? Pourquoi ?
Ou bien est-ce récurrent dans vos pensées ?
Qu’est-ce qui vous paraîtrait le plus difficile dans votre nouveau poste ?
Et aussi, quels sont vos éléments d’appui comme autant de tremplins pour sentir votre autorité naturelle dès votre prise de poste ?