Trop-plein partout, sans arbitrage !
Arbitrer, c’est comme renoncer ! Le monde économique continue à vivre dans l’illusion de la croissance infinie !
Croissance du business ? Certes, il y a de la place pour faire mieux que la concurrence, ou pour des innovations utiles à la modération.
D’ailleurs, votre prise de poste est-elle liée à des objectifs de « reconquête », ou de saine optimisation ? Dit autrement, course au C.A et à la marge, ou un équilibre incluant le RSE ?
Comme la pression sur la rentabilité est souvent forte, c’est l’humain qui sert de variable d’ajustement. Pour les « heureux » salariés rescapés, cela se traduit par une charge qui croit quasiment sans cesse. Faire plus avec moins, tout en étant plus agile, plus rapide, plus intelligent, plus mobile. Puisque les structures et les moyens sont plus compliqués à bouger et à appréhender, c’est l’humain qui doit s’adapter. Comme si l’humain était plus facile à remplir, à faire bouger et à appréhender que les systèmes !
Les business plans sont toujours ambitieux pour tenter de générer plus qu’avant. Et les projets d’adaptation : réorganisation, digitalisation, … , s’invitent en plus des opérations et des embuches inévitables, ou supplémentaires liées aux nouvelles conditions sanitaires contraignantes.
Du coup, les urgences nouvelles pleuvent de façon impromptue : des demandes du management et des imprévus dans un environnement qui est loin de se simplifier.
Hélas, dans cet environnement en effervescence, peu de Managers prennent du recul pour calmer le jeu. Ils ont tendance à prendre cette effervescence comme une nouvelle donnée à intégrer et à gérer. Eux-mêmes, en surcharge, transmettent les nouveaux sujets vers le bas.
Du coup, il devient urgent de se poser pour remettre de l’ordre et du bon sens. Ordre et bon sens !…
Prioriser, mais comment ?
Pour l’ordre, il s’agit de prioriser.
Pour prioriser, il s’agit de choisir les bons critères, des critères rationnels, et de les utiliser pour ordonner l’ensemble des activités. Les trois critères classiques sont coût, qualité et délai.
Pour les coûts, parlons plutôt du gain net, c’est à dire, les gains escomptés moins les coûts engendrés. Les écueils consistent à :
- Minimiser les coûts dans tenir compte d’une baisse potentiellement supérieure du gain associé,
- Minimiser des coûts de façon inadéquate, couper des petits coûts et en maintenir des plus importants par ailleurs
- Oublier de prendre en compte les coûts humains, nombreux ! (Besoins de formation, coût du stress, …)
- Demander plus d’effort en bas de la hiérarchie qu’en haut, alors que la valeur ajoutée se crée sur le terrain.
- Ne pas revenir sur des habitudes de confort, sans réelle valeur ajoutée
- Ne pas tenir compte du facteur humain, que cela concerne les producteurs ou les utilisateurs.
Pour la qualité, revenons à la définition de la qualité : c’est ce qui est attendu par l’utilisateur, ni plus, ni moins. Donc, on va être attentif à :
- Définir les vrais besoins, du point de vue des utilisateurs, les (re)définir avec eux, et les challenger sur l’essentiel.
- Éviter la sur-qualité, celle du perfectionniste, qu’il soit utilisateur ou producteur, ou même Manageur
- Éviter aussi la sous-qualité, du vite expédié en instruction ou en réalisation, qui demandera du retravail. Cela commence parfois par des instructions imprécises, un temps insuffisant pour communiquer précisément.
Pour la notion de délai, l’idée est de penser aux quick wins, qui ont pour effet de convaincre et de rallier. Et aussi de considérer que ce qui est fait plus rapidement sous-tend moins de tâches, et des tâches à meilleure valeur ajoutée. En revanche, on se méfiera de tenter de faire plus vite, en privilégiant plutôt faire mieux (changement de niveau 2)
Une approche complémentaire est que tout n’est pas au même niveau d’importance ou d’urgence. Voici donc 2 critères à considérer avec rigueur : parfois on a tendance à confondre importance et urgence. Car, comme souvent l’important n’a pas été traité quand il n’était pas urgent, à cause des urgences, l’important devient alors aussi urgent ! Il convient donc d’investir rigoureusement du temps sur l’important, en arbitrant suffisamment pour en dégager !
Une approche complémentaire est que tout n’est pas au même niveau d’importance ou d’urgence. Voici donc 2 critères à considérer avec rigueur : parfois on a tendance à confondre importance et urgence. Car, comme souvent l’important n’a pas été traité quand il n’était pas urgent, à cause des urgences, l’important devient alors aussi urgent ! Il convient donc d’investir rigoureusement du temps sur l’important, en arbitrant suffisamment pour en dégager !
Donc, prioriser ne suffit pas pour s’en sortir, car prioriser est une notion d’ordonnancement de toute la liste des choses à faire. Tout reste à l’ordre du jour, la liste des obligations peut donc continuer à s’allonger sans fin.
Arbitrer, mais pourquoi ?
Précisément, il convient d’aller au-delà de la priorisation pour véritablement annuler des tâches, ou les réduire drastiquement. Là , nous entrons dans le bon sens.
Commençons par « réduire drastiquement ». Il s’agit d’utiliser la loi de Paréto : 20% du temps suffisent à attendre 80% de l’objectif. Et on va passer 80% du temps à accomplir les 20% restants. Ah, on peut peut-être s’arrêter à 80% de l’objectif, considérant qu’il est désormais plus important de passer au 20/80 d’une autre activité, et ainsi de suite !
Quant à arbitrer des activités, cela revient, après les avoir priorisées, à mettre un couperet après les top 3 ou 5 activités qui vont produire les principaux résultats. Puis l’arbitrage consiste à renoncer à la queue de l’histogramme, à dire non, à décider si on fait l’activité A à l’exclusion de l’activité B ou le contraire. Dans tous les cas, un arbitrage est un renoncement.
Alors que la simple priorisation laissait supposer qu’on devrait tout faire, ce qui est d’avance épuisant !
Qui priorise ou arbitre ?
Dans les 2 cas de priorisation et d’arbitrage, Il convient bien sûr d’associer les personnes au bon niveau :
- Pour recueillir des informations fiables et factuelles, de façon à mener des raisonnements basés sur des données justes et assez exhaustives
- Pour que les analyses soient partagées. Cela évite les remises en question et la non-implication ultérieure des acteurs. Au contraire, en associant les futurs acteurs dans la priorisation et l’arbitrage, vous en faites des alliés.
- Pour que les décisions soient prises au bon niveau !
- Vous privilégiez les décisions au plus près du terrain, ce qui développe l’autonomie et la prise d’initiatives. Vous évitez donc de prendre des décisions si elles peuvent être prises par vos collaborateurs, ou s’ils managent eux-mêmes de les déleguer encore à un niveau plus opérationnel.
- Vous prenez en revanche et assumez complètement les décisions qui sont vraiment à votre niveau de responsabilité.
- Et vous vous abstenez absolument de prendre des décisions à la place de votre hiérarchique, s’il ne vous a pas officiellement délégué le cas de figure. Donc, pas de lecture de pensée à sa place. Pas de décision à sa place, non plus, s’il n’est pas disponible (au pire, un écrit « sans contrordre de ta part, je propose de … »). Pas non plus de décision à sa place pour le soulager, si ce n’est pas dans vos rôles et responsabilités.
Communiquer et méta-communiquer sur l’arbitrage
Pas de décision en chambre ! Communiquer avec les acteurs concernés est évidement clé pour prendre les meilleures décisions. Surtout sur le terrain, pour impliquer les réalisateurs.
Donc, vous allez déclencher une réunion ad hoc, en durée et en participants pour recueillir les idées, les avis, et les réactions. Vous pourrez plus facilement ajuster les décisions.
Méta-Communiquer est aussi clé pour impliquer encore plus sûrement. Exemple : « j’ai besoin qu’on se coordonne pour arbitrer 2 sujets ». Ou bien, « J’aimerais profiter d’un arbitrage important pour qu’on clarifie à nouveau nos rôles respectifs ».
Les écrits, comme support de priorisation et d’arbitrage !
Certaines personnes ont besoin d’écrits pour « voir » ce qui se passe. D’autres se contentent de paroles. Toutefois, pour rendre les choses factuelles autant que pour acter les priorisations et les arbitrages, rien de vaut des écrits en plus d’un échange. En particulier sur des décisions d’arbitrage, où des renoncements sont dans la balance.
L’intérêt des renoncements, c’est qu’ils offrent souvent la possibilité de simplifier et d’alléger au lieu de complexifier et de remplir toujours plus.
Voici quelques types d’écrits bien adaptés aux priorisations et arbitrages :
- Liste et sources des faits
- Définition des critères de décision
- Analyses synthétiques
- Proposition de décision et arbitrages, résolutions
- Plan d’action
- Mise à jour du manuel qualité
Travaux pratiques d’arbitrage
- Quel est votre niveau d’aisance pour prioriser des actions, vs considérer que des activités ou des projets d’ampleur similaire sont à prendre en compte avec la même importance ?
- Quel est votre capacité à arbitrer et à assumer de renoncer, dire non, remettre en cause l’existant ?
- Quel est votre niveau de confort pour demander à votre hiérarchique d’arbitrer entre plusieurs options, dans l’idée que tout n’est pas tenable ?
- Avec quelle facilité demandez-vous à vs N- de décider des arbitrages, en résistant à décider à leur place, non pas pour vous défausser, mais dans un réel désir de les responsabiliser ?
- Quel sujet concret pouvez-vous utiliser pour expérimenter quelques idées de cet article ? Pouvez-vous vous poser 10 minutes pour tester ? Si oui, go for it ! Sinon, ben, retourner courir et vous épuiser dans la petite cage qui tourne est donc paradoxalement si confortable ?